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Laurent Courtecuisse et Mathilde Charton
Paris
    La Cour de Justice de l’Union Européenne limite
l’accès au registre des bénéficiaires effectifs
Arrêt CJUE C 37/20 et C 601/20 du 22 novembre 2022
Dans un arrêt du 22 novembre 2022, la Cour de justice européenne estime que l'accessibilité des registres de bénéficiaires effectifs des sociétés au grand public n'est ni nécessaire ni
proportionnée.
1. Législationapplicable
La directive 2015/849 du Parlement Européen et du Conseil modifiée vise à identifier les bénéficiaires effectifs de sociétés afin de lutter contre le blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme ainsi qu'à assurer la sécurité des relations commerciales et la confiance dans les marchés.
Aux termes de l’article L.561-2-2 du Code monétaire et financier, le bénéficiaire effectif est défini comme la ou les personnes physiques :
« 1° Soit qui contrôlent en dernier lieu, directement ou indirectement, le client ;
2° Soit pour laquelle une opération est exécutée ou une activité exercée. »
L’article 30.5 c) de la directive impose aux États membres de rendre les informations sur les bénéficiaires effectifs accessibles à tout membre du grand public dans un registre (ndlr. Registre des Bénéficiaires effectifs ou RBE).
Les membres du grand public sont autorisés à avoir accès, au moins, au nom, au mois et à l’année de naissance, au pays de résidence et à la nationalité du bénéficiaire effectif, ainsi qu’à la nature et à l’étendue des intérêts effectifs détenus.
Ces dispositions ont été reprises à l’article L.561-46 du Code monétaire et financier lequel dispose que :
2. Lesfaits
Le Luxembourg a mis en œuvre cette directive et a ainsi rendu public, sur Internet, le registre des bénéficiaires effectifs.
Une société luxembourgeoise conteste la validité, devant les juridictions luxembourgeoises, de cette transparence au motif qu’elle violerait le droit à la protection de la vie privée et le droit à la protection
domicile personnel de ces bénéficiaires ainsi que sur les modalités du contrôle que ces derniers exercent sur la société ou l'entité.
Seules sont accessibles au public, les informations relatives aux nom, nom d'usage, pseudonyme, prénoms, mois, année de naissance, pays de résidence et nationalité des bénéficiaires effectifs ainsi qu'à la nature et à l'étendue des intérêts effectifs qu'ils détiennent dans la société ou l'entité. »
Pour garantir néanmoins les droits au respect de la vie privée et à la protection des données à caractère personnel, le paragraphe 9 de cet article 30 accorde aux États membres la possibilité de prévoir, au cas par cas, des dérogations à la divulgation d’informations sur les bénéficiaires effectifs via des registres et à l'accès à de telles informations mais conditionne ces dérogations à « des circonstances exceptionnelles à définir en droit national » qui exposeraient le « exposerait le bénéficiaire effectif à un risque disproportionné, à un risque de fraude, d’enlèvement, de chantage, d’extorsion, de harcèlement, de violence ou d’intimidation, ou lorsque le bénéficiaire effectif est un mineur ou est autrement frappé d’incapacité. »
Les articles 7 et 8 de la Charte des Droits fondamentaux de l’UE sont relatifs au respect de la vie privée et familiale ainsi qu’à la protection des données à caractère personnel.
    « Les sociétés et entités mentionnées au 1° de l'article L. 561-45-1 déclarent au registre du commerce et des sociétés, par l'intermédiaire de l'organisme mentionné au deuxième alinéa de l'article 2 de la loi n° 94-126 du 11 février 1994 relative à l'initiative et à l'entreprise individuelle, les informations relatives aux bénéficiaires effectifs. Ces informations portent sur les éléments d'identification et le
  Droit des affaires 17











































































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