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  des données personnelles, droits garantis par les art. 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE.
Les tribunaux luxembourgeois ont saisi la CJUE de plusieurs questions préjudicielles au regard notamment de la compatibilité de l’accès du grand public à certaines des données figurant dans le RBE avec la Charte des droits fondamentaux de l’UE ainsi qu'avec le RGPD.
que par les autorités compétentes.
En conséquence, la Cour de Justice de l’Union Européenne invalide les dispositions de l'article 30, 5, c, de la directive 2015/849 modifiée en ce qu’elles prévoient que les États membres doivent veiller à ce que les informations sur les bénéficiaires effectifs des sociétés et autres entités juridiques constituées sur leur territoire soient accessibles dans tous les cas à tout membre du grand public.
4. ConséquencesdecettedécisionenFrance
Comme rappelé précédemment, l’article L.561-46 du Code monétaire et financier reprend les termes de l’article 30, 5, c) de la directive, invalidé par la CJUE.
Aussi, la France à l’instar de huit autres pays européens, a suspendu, suite à la publication de cette décision, l’accès à son registre des bénéficiaires effectifs.
Face aux nombreuses réactions de mécontentement liée à cette restriction d’accès, le Ministère de l’économie a annoncé, jeudi 19 janvier 2023 dans un communiqué que l’accès au registre des bénéficiaires effectifs pour le grand public avait été temporairement rétabli, près de trois semaines après son interruption.
Toutefois, les futures modalités d’accès aux données du registre des bénéficiaires effectifs tenant compte de la décision de la CJUE seront définies prochainement, tout en assurant que « [les] organes de presse et [les] organisations de la société civile y ayant un intérêt légitime » pourront continuer d’accéder au registre.
Le législateur devrait donc très rapidement plancher sur cette problématique.
       (Pour rappel : Le renvoi préjudiciel permet aux juridictions des États membres, dans le cadre d’un litige dont elles sont saisies, d’interroger la Cour sur l’interprétation du droit de l’Union ou sur la validité d’un acte de l’Union. Il appartient ensuite à la juridiction nationale de résoudre l’affaire conformément à la décision de la Cour. Cette décision lie, de la même manière, les autres juridictions nationales qui seraient saisies d’un problème similaire.)
   3. L’avis de la Cour de Justice de l’Union Européenne
La CJUE rappelle tout d’abord que toute ingérence dans les droits fondamentaux doit (1) reposer sur une base légale, (2) ne pas porter atteinte au « contenu essentiel » du droit fondamental, (3) viser un objectif d’intérêt général et, enfin, (4) être apte, nécessaire et proportionnée au but poursuivi.
Elle applique ces critères à la directive en cause.
Pour la Cour, l'accessibilité du grand public aux informations sur les bénéficiaires effectifs constitue une ingérence grave dans les droits fondamentaux consacrés aux articles 7 et 8 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE.
En effet, « dans la mesure où les informations mises à la disposition du grand public ont trait à l'identité du bénéficiaire effectif ainsi qu'à la nature et à l'étendue de ses intérêts effectifs détenus dans des sociétés, elles sont susceptibles de permettre de dresser un profil concernant [...] l'état de fortune de l'intéressé ainsi que les secteurs économiques, les pays et les entreprises spécifiques dans lesquels celui-ci a investi »
L’ingérence ne serait pas non plus, à son sens, proportionnée à l’objectif d'intérêt général de prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, qui ne doit être réalisé
      Droit des affaires 18

















































































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