Page 5 - L'Actu NMCG 74
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   Arnaud Blanc de la Naulte et Chloé Perez Paris  CDD, il convient de faire bénéficier au conseiller du salarié les prescriptions de l’article L.2421-8 du Code du travail, aux termes desquelles l’inspecteur du travail doit autoriser la cessation du CDD de certains salariés protégés, même si, là encore, le cas précis du conseiller du salarié n’est pas visé. Une telle décision ne manque a priori pas d’étonner, au regard du principe général suivant lequel il n’existe « pas de nullité sans texte ». Bien consciente de ceci, la Haute Cour n’oublie pas de fonder sa position, en avançant très clairement que celle- ci est liée à la « recodification étant intervenue à droit constant ». Il faut entendre par là qu’antérieurement aux réformes, le Code du travail (ancien article L.412-8 du Code du travail) prévoyait effectivement une protection du conseiller du salarié, et renvoyait aux dispositions relatives au délégué syndical, permettant d’asseoir -relativement- clairement, qu’il revenait à l’employeur d’interroger l’administration avant de rompre le CDD arrivé à son terme, tout comme dans l’hypothèse du DS. Si depuis la refonte, le Code du travail dispose uniquement que : « L'exercice de la mission de conseiller du salarié ne peut être une cause de rupture du contrat de travail. Le licenciement du conseiller du salarié est soumis à la procédure d'autorisation administrative prévue par le livre IV de la deuxième partie. » ne faisant plus fait aucun renvoi au statut du délégué syndical, selon la Cour, et par le truchement de la codification à droit constant, en l’absence de disposition contraire, il convient de considérer que la protection du conseiller du salarié n’était pas abrogée. De nombreux auteurs estiment qu’une telle jurisprudence est « sans surprise », dès lors qu’il a notamment été jugé que : • il convient de considérer que le travailleur temporaire conseiller du salarié bénéficie d’une protection contre le licenciement, même dans l’hypothèse où l’entreprise de travail temporaire décide de ne plus lui confier de mission (ce cas ayant disparu après recodification) (Cass., soc., QPC, 13 février 2012, n°11-21.946) ; • le conseiller du salarié bénéficie de la protection de 6 mois suite au terme de son mandat, même si le Code du travail ne prévoit plus expressément cette hypothèse (Cass., soc., 27 janvier 2011, n°08-44.376) ; Pourtant, un tel raisonnement nous semble des plus contestables, dès lors que les dispositions sur lesquelles la Cour de cassation fondent sa décision avaient été abrogées et n’étaient plus en vigueur au moment de l’instance. Dès lors que dans le cadre de la recodification, les mentions en litiges n’étaient pas reprises par le Code du travail aux nouveaux articles, il était parfaitement possible de considérer que cette mention avait elle-même été abrogée. Sinon, pourquoi procéder à un tel changement ? Il semble toutefois que notre analyse ne soit pas partagée par la Haute Cour, celle-ci préférant juger qu’en dépit de ce qu’une mention, ou un renvoi vers une autre disposition soit ôté, le principe a toujours vocation à s’appliquer. Ce faisant, la Cour de cassation vient pallier la carence du législateur dans la rédaction du texte légal. Cette manœuvre de rattrapage nous semble créer alors une grande insécurité juridique puisqu’elle induit que l’ensemble des dispositions du Code du travail en vigueur aujourd’hui doivent être interprétées à l’aune de dispositions abrogées depuis une dizaine d’année. L’intelligibilité de la loi s’en trouve alors clairement mise à mal. Outre ce qui précède, la lecture de l’arrêt d’appel validé démontre la sévérité d’une telle position au cas d’espèce, puisque : • le salarié n’a nullement contesté le bien-fondé du recours au CDD, reconnaissant, implicitement, qu’il est pleinement justifié ; • ce dernier n’a par ailleurs pas fait état de ce que la rupture du contrat est liée à son mandat, de sorte qu’aucun manquement n’est à reprocher à l’employeur sur ce point.  En l’absence d’une telle formalité, la rupture doit être jugée comme étant nulle, et l’employeur est condamné à verser au salarié diverses sommes, notamment les salaires dus jusqu’à la fin de la période de protection.   Droit social 5 


































































































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