Page 9 - L'Actu NMCG 74
P. 9

   Arnaud Blanc de la Naulte et Tiphaine Dubé Paris  requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein (CA Riom, 21 mai 2019, n° 18/01045). Selon les juges du fond, il y avait donc lieu de n’appliquer le plafond de la durée légale hebdomadaire que dans l’hypothèse où la durée du travail du salarié était décomptée sur la semaine. Dans le cadre de son pourvoi devant la Cour de cassation, le salarié soutenait que la cour d’appel avait violé les dispositions de L. 3123-17 du Code du travail (dans leur version applicable au moment des faits et désormais codifiées à l’article L. 3123-9) selon lesquelles les heures complémentaires ne peuvent avoir pour effet de porter la durée de travail accomplie par un salarié à temps partiel au niveau de la durée légale du travail ou, si elle est inférieure, au niveau de la durée de travail fixée conventionnellement. Il revenait donc à la Cour de cassation de trancher la question de savoir si lorsque la durée du travail d’un salarié à temps partiel est décomptée mensuellement, ce dernier peut dépasser la durée légale hebdomadaire. La Cour de cassation répond par la négative, censurant l’arrêt rendu par la cour d’appel de Riom. La Haute juridiction juge ainsi que si les heures complémentaires effectuées par le salarié à temps partiel le conduisent à atteindre 35h sur une semaine, cela entraine automatiquement la requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein à compter de la date de ce dépassement, peu important que la durée de travail prévue au contrat de travail soit décomptée de façon mensuelle. Elle précise ainsi que la limite relative à l’atteinte de la durée légale hebdomadaire s’applique également aux salariés à temps partiel dont la durée du travail est décomptée mensuellement. Cette solution n’était pas pour autant évidente au regard des dispositions du Code du travail. En effet, les dispositions de l’article L. 3121-17 du Code du travail désormais codifié à l’article L. 3123-9 ne précisent pas si la durée légale qui ne doit pas être atteinte par le salarié à temps partiel doit s’entendre comme étant celle décomptée sur la semaine ou bien sur le mois. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle l’on pouvait supposer (comme l’a fait la cour d’appel) que la durée légale à laquelle cet article fait référence devait s’entendre comme étant : • de 35h pour les salariés à temps partiel dont la durée du travail est décomptée de façon hebdomadaire, • et de 151,67 heures pour les salariés à temps partiel dont la durée du travail est décomptée de façon mensuelle. Ce n’est manifestement pas la position de la Cour de cassation. Cette décision s’inscrit donc dans la lignée de la jurisprudence de la Cour relative : • aux salariés à temps partiel dont la durée du travail est décomptée de façon hebdomadaire (Cass. soc. 24 mars 2010 n° 08-42.186) ; • ainsi qu’aux salariés à temps partiel soumis au régime de la modulation du temps de travail (Cass. soc. 23 janvier 2019 n° 17-19.393). Au regard de cette position particulièrement stricte de la Cour de cassation, les employeurs devront se montrer particulièrement vigilants quant aux heures de travail réalisées chaque semaine par leurs salariés à temps partiel. En effet, un seul dépassement sur une semaine serait suffisant pour qu’un salarié puisse obtenir la requalification de son contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein. Il sera donc indispensable de veiller à ce que les salariés à temps partiel travaillent en deçà de 35h sur une semaine (ou de la durée conventionnelle du travail si celle-ci est inférieure), quel que soit le mode de décompte de la durée du travail de ces salariés.    Enfin et pour conclure, nous ne le répèterons jamais assez : il serait en réalité utile pour tous que le droit du travail puisse, un jour, être teinté de « bon sens ». Entreprises comme salariés y gagneront nécessairement. Car, in fine, requalifier un contrat à temps complet de manière définitive sur la base d’une seule semaine travaillée au-delà de la durée prévue, ce n’est rien d’autre que le signe d’une matière (le droit social) qui se meurt de son caractère inintelligible et souvent totalement absurde. Droit social 9 


































































































   7   8   9   10   11