Page 13 - L'Actu NMCG 76
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   Claire Peroux et Florence Jean Nice
  Commentaire d'arrêt : un salarié réintégré après que son licenciement a été jugé nul a le droit à des jours de congés payés pour la période
 d’éviction pendant laquelle il n’a pas travaillé
Cass. soc. 1er décembre 2021 n° 19-24.766 FP-BR, T. c/ Sté Frost & Sullivan Limited
Par l’arrêt du 1er décembre 2021, la Cour de cassation a jugé que le salarié réintégré après que son licenciement ait été jugé nul a le droit à des jours de congés payés pour la période d’éviction pendant laquelle il n’a pas travaillé. La plus Haute juridiction abandonne ainsi son ancienne jurisprudence pour se conformer à la jurisprudence européenne.
En effet, jusqu’ici la Cour de cassation considérait qu’à défaut de travail effectif au service de son employeur, que le salarié réintégré ne pouvait pas bénéficier de jours de congés pour la période d’éviction, cette période ouvrant droit à une indemnité d’éviction (Cass. soc. 11 mai 2017 n°15-19.731 FS-PB : RJS 7/17 n°493).
Par la suite, elle a confirmé sa jurisprudence en affirmant que la période d’éviction ne pouvait pas être considérée comme constituant un temps de travail effectif ouvrant droit à congés payés (Cass. soc. 30 janvier 2019 no 16-25.672 F-D).
Toutefois, la Chambre sociale ne pouvait continuer d’avoir cette analyse, dans la mesure où la Cour de Justice de l’Union Européenne considère depuis longtemps que la période comprise entre le licenciement jugé nul et la réintégration doit être assimilée à du travail effectif et ouvre droit à congés payés. Transposant sa jurisprudence relative au
travailleur absent pour maladie (CJUE 24 janvier 2012, aff. 282/10 : RJS 4/12 n°399).
Désormais, il doit donc être accordé des congés payés au titre de la période d’éviction, à l’exception des périodes pendant lesquelles le salarié a travaillé pour un autre employeur, étant précisé que la Chambre sociale a indiqué que ce droit vise tant les congés légaux (art. L 3141-3 du Code du travail) que les jours de congés supplémentaires accordés par les conventions et accords collectifs, les contrats de travail ou les usages (art. L 3141-9 du Code du travail).
Pour aller plus, il est précisé que le cas des salariés protégés licenciés sur autorisation administrative qui est ensuite annulée est différent, dans la mesure où l’indemnité d’éviction qui leur est versée est légalement considérée comme complément de salaire (art. L2422-4 du Code du travail). La Cour de cassation a donc jugé que cette indemnité d’éviction ouvre droit au paiement des congés payés afférents (Cass. Soc, 1er décembre 2021, n°19-24.715 FP-B).
 En revanche, la Cour de cassation n’a pas précisé si le salarié peut solliciter le report illimité des congés payés acquis pendant cette période d’éviction, alors qu’à ce jour, ce droit au report illimité a été reconnu par le Juge européen.
Droit social 13






















































































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