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  Cette enquête, qui avait conduit le Directeur des Ressources Humaines à interroger 8 personnes sur les 20 composant le service auquel appartenait le salarié, avait notamment révélé le manque d’implication de celui-ci dans son travail, mais surtout, un comportement constitutif d’un harcèlement moral de sa part envers l’une de ses collègues.
Plus précisément, il avait notamment été reproché au salarié :
• d’imiter continuellement le bruit d’un cheval et d’utiliser l’expression « double poney »,
• d’adopter une attitude sarcastique et moqueuse à l’égard d’une de ses collègue, malgré ses demandes de cette dernière de cesser ce comportement qui avait entrainé des conséquences à son égard.
Au regard des résultats de l’enquête, le salarié avait donc été licencié pour faute grave.
Celui-ci avait alors contesté la rupture de son contrat de travail devant le conseil de prud’hommes, lequel l’avait débouté de ses demandes.
La cour d’appel n’avait néanmoins pas suivi le même raisonnement que les juges de première instance et avait infirmé le jugement aux motifs que :
• toutes les personnes composant le service du salarié accusé de harcèlement moral n’avaient pas été entendues ;
• l’enquête n’avait pas été confiée au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) ;
• les critères ayant déterminé la sélection des témoins entendus dans le cadre de l’enquête n’étaient pas connus.
La cour d’appel avait ainsi jugé le licenciement du salarié comme étant sans cause réelle et sérieuse.
L’employeur a alors formé un pourvoi en cassation, reprochant notamment aux juges de la cour d’appel d’avoir méconnu les dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile en :
• n’ayant pas pris en considération ni analysé les éléments issus de l’enquête interne diligentée par la Direction des ressources humaines,
• n’ayant pas tenu compte de ses explications selon lesquelles les salariés entendus étaient les collègues travaillant au plus près du salarié accusé de harcèlement moral.
Visant les dispositions de l’article 455 du Code de procédure civile et rappelant qu’il incombe aux juges de motiver leur jugement en examinant « les éléments de preuve qui sont soumis par chacune des parties au soutien de leurs prétentions », la Cour de cassation donne raison à l’employeur.
L’arrêt rendu par la cour d’appel de Colmar est donc cassé et l’affaire est renvoyée devant la cour d’appel de Metz.
Ainsi, à travers cette décision, la Haute juridiction juge que le fait que l’employeur ait mené une enquête sans y associer les élus ni même les avoir consultés constitue un mode de preuve valide qui se doit d’être examiné par les juges du fond.
Une telle décision ne peut qu’être saluée dans la mesure où retenir le contraire laisserait supposer que l’employeur n’est pas légitime à mener seul une telle enquête.
Par ailleurs, à travers cette solution inédite, la Cour de cassation rappelle que tous les collaborateurs n’ont pas à être entendus dans le cadre de l’enquête menée par la direction à la suite de la dénonciation de faits de harcèlement moral, reprenant ainsi une solution déjà rendue dans un arrêt récent (Cass. soc., 8 janvier 2020, n° 18-20.151).
Cette décision, pleine de bon sens, vient donc donner de nouvelles clés aux employeurs pour mener à bien leur enquête en cas de dénonciation de faits de harcèlement moral.
 La Haute juridiction juge ainsi que la cour d’appel ne pouvait écarter les éléments découlant de l’enquête interne menée par l’employeur, quand bien même celle-ci n’avait pas été confiée au CHSCT.
  Droit social 12













































































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