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  La société a naturellement interjeté appel de cette décision devant la Cour d’appel de Versailles, sollicitant du juge qu’il assure le respect de l’accord tel que signé entre les partenaires sociaux. Elle faisait ainsi valoir qu’appliquer la nouvelle règle de calcul revendiquée par le CSE revenait à modifier les termes de l’accord.
Le CSE s’évertuait, de son côté, à soutenir que ce dernier n’appliquait pas la formule légale alors qu’un accord dérogatoire ne peut pas être moins avantageux pour les salariés que la formule légale définie par le guide de la DGT de 2014.
La Cour d’appel de Versailles ne suit pas le raisonnement du Tribunal et du CSE, estimant notamment que ce dernier ne démontrait pas que le calcul de la réserve spéciale de participation tel qu’il résulte de l’accord de 2013 n’est pas conforme à la formule légale. Il existait, selon elle, un vide juridique s’agissant de la notion de capitaux propres à prendre en compte en l’espèce pour le calcul de la réserve spéciale.
Le CSE décidait toutefois de ne pas en rester là, et de se pourvoir en cassation.
► La Cour de cassation s’épargne un débat juridique complexe sur la notion de capitaux propres et considère tout simplement que l’action du CSE est irrecevable
Si la société avait invoqué l’irrecevabilité de l’action du CSE, force est de constater qu’elle ne l’avait manifestement pas fait sur le bon terrain juridique.
En effet, elle soutenait, devant la Cour d’appel de Versailles, que le CSE ne disposait d’aucun intérêt à agir, en ce qu’il ne démontrait pas une atteinte à ses intérêts personnels ni un préjudice direct, et a fortiori parce que le comité avait validé à l’unanimité l’accord de participation.
La cour d’appel avait rejeté cet argument : plus de peur que de mal puisque la société a eu gain de cause devant la cour de cassation.
Etonnamment, la société ne soutenait pas que l’action du CSE était irrecevable car prescrite au regard des dispositions de l’article L. 2262-14 du Code du travail qui enserre les actions en nullité d’un accord collectif dans un délai de 2 mois. En l’occurrence, tel était bien le cas puisque l’accord a été conclu en 2013, et l’action intentée 5 ans plus tard.
Peut-être avait-elle décidé de ne pas soutenir un tel raisonnement, estimant que l’action du CSE était justifiée par la possibilité d’invoquer l’exception d’illégalité, laquelle n’est encadrée par aucun délai spécifique.
Ce mécanisme juridique – issu du droit administratif – consiste à contester la validité d’un acte règlementaire aux fins d’écarter la mesure d’application individuelle qui a été prise sur son fondement.
Il permet ainsi aux syndicats et représentants du personnel de contourner ce délai de 2 mois pour invoquer l’illégalité d’un texte conventionnel.
La Cour de cassation estime, toutefois, et c’est en cela que cet arrêt est particulièrement intéressant, que si le CSE est bien fondé à utiliser cette technique juridique pour invoquer l’illégalité d’un accord collectif, il ne peut, en revanche, le faire s’il est signataire de cet accord.
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