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   Arnaud Blanc de la Naulte
et Zoé Évène Paris
 constitue pas une faute imputable aux salariés concernés dont la société VALHESTIA se serait rendue complice » ;
• et surtout que le « simple transfert d’informations, pour l’un très ancien, avant même les projets de création de la société VALHESTIA, ne saurait être jugé comme fautif en l’absence de preuve de leur exploitation par un moyen fautif de la part des anciens salariés de la société FONCIA ».
La Cour d’appel a ainsi jugé que le seul fait pour les anciens salariés d’avoir, avant leur départ de la société FONCIA, récupéré les fichiers clients à savoir, la liste des résidences gérées par cette dernière ainsi que les e-mails des membres des conseils syndicaux de ces résidences, ne suffisait pas, en l’absence de la preuve de l’exploitation de ces informations par un moyen fautif, à caractériser un acte de concurrence déloyale.
Par un arrêt en date du 7 décembre 2022 et publié au bulletin, la Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel en toutes ses dispositions.
Si le premier moyen de cassation est conforme aux règles applicables en la matière, le second constitue un réel apport.
En effet, s’agissant du premier moyen, la Cour de cassation rappelle simplement que « constitue un acte de concurrence déloyale le fait, pour une société à la création de laquelle a participé le salarié d’une société concurrence, de débuter son activité avant le terme du contrat de travail liant ceux-ci » et reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir recherché si un tel acte n’était pas constitué par l’envoi par la société VALHESTIA d’une proposition de contrat à un client de la société FONCIA.
S’agissant du second moyen, la Cour de cassation, dans un attendu de principe rendu au visa de l’article 1240 du Code civil (anciennement 1382), fait valoir que :
« Le seul fait, pour une société à la création de laquelle a participé l’ancien salarié d’un concurrent, de détenir des informations confidentielles relatives à l’activité de ce dernier et obtenues par ce salarié pendant l’exécution de son contrat de travail, constitue un acte de concurrence déloyale ».
La Cour de cassation considère ainsi que la Cour d’appel, en jugeant que le transfert des fichiers clients à la société concurrente par l’intermédiaire des anciens salariés n’était pas répréhensible en l’absence de preuve de l’exploitation de ces fichiers par un moyen fautif, a violé les dispositions de l’article 1240 du Code Civil.
La Cour d’appel avait en effet ajouté une condition non exigée par le texte.
Cette précision de la Cour de cassation est bienvenue car elle permet de préserver les intérêts de la société ancien employeur face au manque de loyauté et de discrétion de ses anciens salariés.
Il convient d’espérer qu’elle ait un effet dissuasif sur les salariés non couverts par une clause de non-concurrence qui doivent avoir conscience de ce que, en l’absence d’une telle clause, leur liberté de travail et d’établissement s’arrête là où commence la concurrence déloyale.
Il pourrait être opportun de connaitre la position de la Chambre Sociale sur ce point.
Toutefois, dans la mesure où le Conseil de prud’hommes n’est compétent pour connaître les faits de concurrence déloyale que lorsqu’ils se sont produits avant la rupture du contrat de travail ou, s’ils sont postérieurs, s’ils sont directement liés à ce dernier, il n’est pas certain que cette dernière ait un jour à se prononcer à ce sujet (Cass. Soc., 30 juin 2010, n°09-67.496).
   La Cour de cassation vient donc affirmer le principe selon lequel la Société concurrente créée par le salarié se rend coupable de concurrence déloyale par le seul fait que ce dernier soit parti avec le fichier clients de son ancien employeur.
Droit social 11

















































































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