Page 11 - L'Actu NMCG 77
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   Arnaud Blanc de la Naulte
et Rim Jebli Paris
 A cet égard, l’inspection du travail vérifie que les faits reprochés au salarié sont d’une gravité suffisante pour justifier son licenciement.
En l’espèce, par une décision en date du 30 juin 2017, l’inspecteur du travail avait refusé d’accorder l’autorisation de licenciement.
En conséquence, l’employeur avait exercé un recours hiérarchique aux fins d’obtenir l’annulation de cette décision, et avait obtenu gain de cause devant la Ministre du travail.
Le salarié a par la suite saisi le tribunal administratif de Paris d’un recours en annulation pour excès de pouvoir, mais il en était débouté.
Par un arrêt du 30 janvier 2020, la Cour administrative d’appel de Paris a toutefois annulé ce jugement ainsi que la décision de la Ministre du travail, estimant qu’en l’espèce, le salarié fournissait plusieurs attestations de salariés qui démentaient sa participation pourtant constatée par procès-verbal d’huissier en date du 20 février 2017.
En effet, selon la Cour, ces témoignages faisaient subsister un doute quant à la participation du salarié à l’incident litigieux, de sorte que ce dernier devait lui profiter.
Saisi par l’employeur, le Conseil d’Etat va, dans un arrêt du 8 décembre 2021, annuler l’arrêt du 30 novembre 2020 et renvoyer l’affaire devant de la Cour administrative d’appel.
Il rappelle ainsi dans un premier temps la valeur juridique des constats d’huissier et invoque les dispositions de l’article 1er de l’ordonnance du 2 novembre 1945 relative au statut des huissiers, dans sa rédaction issue de la loi du 22 décembre 2010 relative à l’exécution des décisions de justice, aux conditions d’exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires, les huissiers de justice, lesquelles prévoient que « peuvent, commis par justice ou à la requête de particuliers, effectuer des constatations purement matérielles, exclusives de tout avis sur les conséquences de fait ou de droit qui peuvent en résulter. Sauf en matière pénale où elles ont valeur de simples renseignements, ces constatations font foi jusqu’à preuve contraire ».
Dans un second temps, le Conseil d’Etat conclu logiquement qu’un constat d’huissier permet
d’établir la réalité et la matérialité des faits reprochés jusqu’à preuve du contraire et que cette preuve n’est précisément pas rapportée par les attestations de salariés.
En conséquence, la Haute juridiction considère qu’un constat d’huissier prévaut sur des attestations émanant de salariés, aucun doute ne pouvant survenir à ce sujet.
Cette décision nous semble pleinement justifiée puisqu’un constat d’huissier constitue un acte authentique et bénéficie dès lors d’une force probante supérieure à des attestations.
Pour rappel, avant la loi 2010-1609 du 22 décembre 2010, les constats d’huissier n’avaient toutefois, de manière générale, la valeur que d’un simple renseignement dont les juges appréciaient la valeur et la portée.
La loi 2010-1609 du 22 décembre 2010 avait donc renforcé leur force probante.
A noter que cet arrêt du 8 décembre 2021 s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence constante du Conseil d’Etat lequel avait déjà fait prévaloir des constats d’huissiers sur des témoignages et des photographies comme preuve de la faute d’un salarié protégé pendant une grève (CE,10 janv.2000, n°157269)
L’employeur a donc tout intérêt à faire intervenir un huissier en cas d’incident afin de se constituer une preuve solide de la réalité et de la matérialité des faits reprochés à son salarié.
  Droit social 11
















































































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