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Laurent Courtecuisse
et Thibault Martins Ribeiro Paris
Nouvelles limites à la liberté statutaire en SAS concernant la définition des règles de majorité Cass. Com., 19 janvier 2022, n°19-12.696
Le 19 janvier 2022, la Cour Dans l’affaire qui a donné lieu à de cassation a rendu un arrêt l’arrêt ici commenté, les statuts important rappelant les limites d’une SAS stipulaient que « les
Il a été débouté tant devant les juridictions de premières instances, qu’en cause d’appel, les juges du fond estimant que la liberté statutaire en matière de règles de majorité permet de stipuler qu’une minorité des voix permet l’adoption de décisions collectives.
Après avoir rappelé le principe de liberté statutaire en matière de fixation des règles de majorité, la Cour de cassation énonce une limite à cette liberté, à savoir que « les résolutions d’une SAS ne peuvent être adoptées par un nombre de voix inférieur à la majorité simple des votes exprimés. »
à la liberté des associés de SAS pour l’établissement des règles de majorité.
L’article L. 227-9 du Code de commerce énonce qu’il revient aux statuts de déterminer les décisions qui doivent être prises collectivement par les associés et d’en fixer « les formes et conditions ».
Les statuts doivent donc établir le mode de consultation des associés (assemblée générale, consultation écrite, etc.) et les règles de quorum et de majorité.
décisions collectives des associés sont adoptées à la majorité du tiers des droits de vote des associés, présents ou représentés, habilités à prendre part au vote considéré. »
Un associé s’estimant lésé par une décision collective adoptée par 229 313 voix contre 269 185, soit une proportion de votes favorables supérieure à un tiers des voix, toutefois inférieure au nombre de votes défavorables, a sollicité l’annulation de la délibération en cause, ainsi que le prononcé de la nullité de cette règle de majorité.
La Haute Cour explique cette limite par la « nécessité d’instituer une règle d’adoption des résolutions [...] qui permette de départager ses partisans et ses adversaires ».
La Cour de cassation déduit de ce principe qu’une clause stipulant qu’une résolution peut être adoptée si elle recueille un nombre de voix favorables inférieurs au nombre de voix défavorables ne permet pas d’effectuer ce départage, « puisque les partisans et les adversaires de cette résolution peuvent simultanément remplir cette condition de seuil ».
Cet arrêt est important en raison de la limite qu’il pose à la liberté statutaire en matière de règle de majorité ► il n’est pas possible de stipuler une règle de majorité en deçà de la majorité simple.
La justification retenue par la Cour, à savoir la nécessité que la règle de majorité applicable permette un départage des associés en faveur et en défaveur d’une délibération, doit aussi être remarquée.
Ce principe pourrait en effet s’appliquer à d’autres problématiques relatives aux décisions des associés en SAS, telles que les règles de quorum.
Droit des affaires 17