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Laurent Courtecuisse et Thibault Martins Ribeiro
Paris
Société en formation : l’avenant au contrat qui n’emporte pas novation, ne couvre pas la nullité absolue de la formation irrégulière du contrat avant l’immatriculation de la société
Cass., Com., 19 janvier 2022, n°20-13.719
Dans un arrêt récent, la Cour de cassation précise l’application du régime de la reprise des actes conclus pour la société en formation.
En l’espèce, une banque a consenti le 20 décembre 2012 un prêt afin de financer l’achat d’un fonds de commerce. Selon le contrat, le prêt était consenti à « l’EURL [I] en cours d’immatriculation au registre du com-merce et des sociétés, représentée par Mme [O] ».
Pour garantir ce prêt, Madame [O] et son époux se sont portés cautions solidaires du remboursement par la société [I] et par avenant du 21 novembre 2013, la société [I] a consenti à la banque un nantissement sur son fonds de commerce.
La société [I] a par la suite été placée en liquidation judiciaire, la banque a donc assigné Madame [O] en paiement des sommes restant à payer.
Dans un arrêt du 5 décembre 2019, la Cour d’appel de Metz a condamné Madame [O] au paiement de ces sommes.
Cette dernière a donc formé un pourvoi en cassation,
arguant d’une irrégularité affectant le contrat de prêt, qui aurait dû entrainer sa nullité.
Sur ce point et au visa de l’article 1842 alinéa 1 du Code civil, la Cour de cassation rappelle que seuls les actes qui mentionnent qu’ils sont « passés au nom et pour le compte d’une société en formation » peuvent être repris par la société après son immatriculation.
Le contrat de prêt en cause, qui ne stipulait pas expressément cette mention, devait donc être frappé de nullité absolue.
La Cour d’appel Metz avait bien relevé ce point mais avait estimé que l’avenant signé par la société, pos- térieurement au contrat de prêt, valait reprise du prêt par cette dernière.
La Cour de cassation censure ce raisonnement car l’avenant stipulait expressément qu’il n’entraînait pas novation du contrat de prêt initial.
Par conséquent, l’acte qui était garanti par les cautions était bien le contrat initial, et non un nouveau contrat repris par la société après son immatriculation. Le cautionnement n’était donc pas valable.
On retiendra donc que :
• la novation d’un contrat peut permettre la reprise d’un ancien acte par un nouveau, lequel instaure de nouvelles obligations qui se substituent aux anciennes et provoque l’extinction des obligations initiales, et ce même dans l’hypothèse où l’acte initial ne pouvait faire l’objet d’une reprise.
• la signature d’un simple avenant, même signé par la société après son immatriculation, ne saurait couvrir la nullité affectant le contrat conclu irrégulièrement par la société.
Droit des affaires 25