Page 11 - NMCG80
P. 11

  d’heures prises, de sorte que ces pièces sont exemptes de toute force probante, ce que l’intéressé ne pouvait ignorer.
Au surplus, la jurisprudence considère depuis de nombreuses années qu’il appartient au représentant du personnel de démontrer le bon usage de son crédit d’heures dès lors qu’une demande en ce sens lui est adressée, et qu’à défaut, il doit être condamné à rembourser les salaires perçus à ce titre, ce qu’il ne pouvait, là non plus, ignorer, au regard du caractère constant de la position de la Cour de cassation à ce sujet.
Ce dernier a donc, in fine, bel et bien refusé de se justifier.
En outre, l’arrêt d’appel nous apprend qu’il était en mesure de démontrer la bonne utilisation d’un certain nombre d’heures (ce qu’il a fait tardivement, à savoir en cause d’appel), mais qu’il était incapable de produire le moindre justificatif pour approximativement 1.000 heures de délégation, soit près de deux tiers d’une année de travail à temps complet.
A contrario, si l’employeur avait refusé de régler les heures de délégation (ce qui aurait pu être compréhensible en l’espèce, dès lors qu’il y avait manifestement une fraude d’une ampleur conséquente), il se serait exposé à un délit d’entrave, et donc à des sanctions à la fois civiles et pénales. (Cass., crim., 11 mai 1999, n°98-82.900)
Par ailleurs, il a été jugé que le non-paiement des heures de délégation rend impossible la poursuite du contrat de travail, et justifie une prise d’acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, produisant les effets d’un licenciement nul, puisque l’intéressé bénéficie d’une protection. (Cass., soc., 17 décembre 2014, n°13-20.703 ; Cass., soc., 14 octobre 2015, n°14-12.193)
Rappelons enfin que les juridictions tant administratives que pénales peuvent se montrer très strictes en matière d’utilisation frauduleuse du crédit d’heures, puisqu’il a été jugé que :
• le délégué syndical qui utilise des bons de délégation falsifiés pour justifier des retards répétés commet une faute grave justifiant son licenciement (CE, 17 avril 1992, n°89834) ;
• le salarié qui s’était fait payer des heures de délégation en tant que délégué syndical et membre du comité d’établissant en remplissant des bons de délégation, alors qu’il s’était absenté pour se consacrer à des activités syndicales dans une entreprise étrangère commet une utilisation frauduleuse de ce système, constituant un délit d’escroquerie (Cass., crim., 8 juillet 1986, n°85.90.088)
Au regard des lourdes sanctions pesant sur l’entreprise en la matière, cette motivation a le mérite de rétablir un certain équilibre : les bons de délégation ne sont pas un blanc- seing autorisant le salarié à poser des heures de délégation sans considération pour les impératifs liés à son mandat.
   Droit social 11
























































































   9   10   11   12   13