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  Dans son arrêt, la Cour de cassation rappelle le principe posé par l’article 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales selon lequel toute personne a droit à la liberté d’expression, comprenant la liberté d’opinion, de recevoir ou communiquer des informations ou des idées.
Elle rappelle néanmoins que l’exercice de ces libertés comportent des devoirs et des responsabilités et peut être soumis à certaines formalités, conditions, restrictions ou sanctions prévues par la loi, et nécessaires dans une société démocratique.
Or, il résulte de l’article L. 1121-1 du Code du travail que, sauf abus, le salarié jouit dans l’entreprise et en dehors de celle-ci de sa liberté d’expression, à laquelle seule des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché peuvent être apportées.
En l’espèce, le contrat de travail du salarié prévoyait des conditions particulières au sein desquelles figurait une clause par laquelle l’animateur reconnaissait avoir pris connaissance et s’engageait à respecter l’ensemble des dispositions du cahier des missions et des charges de France 2, et de la Charte des antennes de France Télévision, et s’engageait notamment au respect « des droits de la personne », lequel constitue une « des caractéristiques majeures de l’esprit devant animer les programmes des chaines publiques de télévision ».
Une autre clause du contrat disposait à ce titre que « toute atteinte à ce principe par Tex, qu’elle se manifeste à l’antenne ou sur d’autres médias, constituerait une faute grave permettant à son employeur, dès celui-ci informé, de rompre immédiatement le contrat. »
Or, la charte des antennes France Télévisions prévoyait au chapitre « respect des droits de la personne » la prohibition de toute complaisance à l’égard des propos risquant d’exposer une personne
ou un groupe de personnes à la haine ou au mépris, notamment pour des motifs fondés sur le sexe, ainsi que le refus de toute valorisation de la violence, et plus particulièrement des formes perverses qu’elle peut prendre telles que le sexisme ou l’atteinte à la dignité humaine.
Reprenant les propos tenus par l’animateur lors de l’émission télévisée du 30 novembre 2017, la Cour d’appel énonce également le contexte particulier de la diffusion de l’émission, en direct et à une heure de grande écoute, alors que l’actualité médiatique est mobilisée autour de mouvements tels que « #Metoo » et « #Balancetonporc ».
La Cour relève également que l’animateur s’était, les jours suivant la diffusion, vanté auprès d’un de ses collègues d’avoir fait « son petit buzz », et avait adopté vis-à-vis d’une candidate du jeu qu’il présentait une attitude déplacée en l’interrogeant à plusieurs reprises sur la fréquence de ses relations sexuelles avec son compagnon.
Au regard de ces éléments, la Cour de cassation énonce que la Cour d’appel a correctement relevé que la réitération par l’animateur Tex de propos misogynes, déplacés et injurieux constituait un abus de la liberté d’expression et une violation de la clause d’éthique à laquelle il avait contractuellement souscrit.
   Ainsi, la Cour de cassation confirme que le licenciement du salarié, fondé sur sa violation d’une clause de son contrat de travail, poursuivait le but légitime de lutte contre les discriminations à raison du sexe et les violences domestiques, et celui de la protection de la réputation et des droits de l’employeur, et que la rupture du contrat de travail n’était par conséquent pas disproportionnée, ni ne portait une atteinte excessive à la liberté d’expression du salarié.
Dans son communiqué de presse, la Cour de cassation précise qu’elle « ne juge pas qu’un humoriste n’a pas le droit de faire une telle « blague » à la télévision », mais « se place ici dans le cadre du contrat de travail que l’intéressé avait signé pour exercer un métier d’animateur à la télévision : elle juge qu’au regard des clauses prévues dans le contrat de travail et des circonstances, concernant tant le salarié que l’employeur, qui ont entouré cette « blague », le licenciement ne constituait pas une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression du salarié. »
Droit social 16






















































































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