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  La banque s’est évidemment pourvue en cassation, reprochant à l'arrêt de rejeter sa demande en paiement formée contre la caution et de lui avoir opposé la prescription biennale prévue par l'article L. 218- 2 du Code de la consommation. Selon la banque, il s’agit bien là d’une exception purement personnelle au débiteur principal, procédant de sa qualité de consommateur et qui ne peut être opposée au créancier par la caution.
3. Lerevirementdejurisprudenceopéréparla Cour de cassation
Aux termes d’un arrêt particulièrement didactique, la Cour de cassation commence par rappeler la jurisprudence constante, selon laquelle la prescription biennale constitue une exception purement personnelle au débiteur principal, procédant de sa qualité de consommateur.
Pour cette raison, elle ne pouvait donc, jusqu’ici, être opposée au créancier par la caution (Cass. 1re civ., 11 déc. 2019, n° 18-16.147).
La Cour de cassation poursuit son raisonnement et précise qu'une telle solution empêchant la caution d’opposer la prescription biennale, exposait en
réalité le débiteur principal au recours personnel de la caution, le privant ainsi lui-même du bénéfice de la prescription biennale attachée à sa qualité de consommateur.
La Cour de cassation en conclut qu'il y a lieu de procéder à un revirement de jurisprudence sur ce point et de considérer que l’acquisition de la prescription biennale de l'article L. 218-2 du Code de la consommation affecte bien le droit du créancier.
Il s’agit donc en réalité, désormais, d’une exception inhérente à la dette dont la caution, qui y a intérêt, peut se prévaloir.
La Cour de cassation valide ainsi la position de la cour d'appel et confirme le rejet de la demande en paiement formée par la banque contre la caution.
4. Pourmieuxcomprendre
Dans sa version en vigueur depuis le 1er janvier 2022, l’article 2298 du Code civil (issu de la réforme du droit des sûretés) dispose désormais que « la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions, personnelles ou inhérentes à la dette, qui appartiennent au débiteur, sous réserve des dispositions du deuxième alinéa de l'article 2293. »
Depuis le 1er janvier 2022, il n’y a donc plus aucune distinction à faire entre les différents types d’exception que la caution peut opposer au créancier pour s’opposer au paiement sollicité.
La caution pourra opposer au créancier, tant ses propres motifs personnels (prescription, nullité du contrat de cautionnement) que les exceptions qui appartiennent au débiteur, dont fait désormais partie la prescription biennale de l’action.
La Cour de cassation a donc considéré qu’elle ne pouvait maintenir sa précédente jurisprudence au risque de « traiter plus sévèrement les cautions ayant souscrit leur engagement avant l'entrée en vigueur de l'ordonnance précitée », et a donc préféré anticiper l’application dans le temps des nouvelles dispositions du Code civil.
  Il convient d’être particulièrement attentif au respect de ces délais. Désormais, peu important que l’acte de cautionnement ait été souscrit avant ou après le 1er janvier 2022, la prescription de l’action à l’encontre du consommateur débiteur principal et de la caution est de deux années à compter de la date d’exigibilité des sommes à recouvrer.
 Droit des affaires 16



















































































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