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  • indiquait que le fait que l’absence du salarié intervienne pendant la période du préavis déposé par le syndicat n’avait aucune incidence dans la mesure où le mouvement de grève visait uniquement l’entreprise et n’était pas d’ordre national.
Selon la cour d’appel, le salarié ne bénéficiait donc d’aucune protection, de sorte que son licenciement pour abandon de poste était donc parfaitement justifié.
Lesalariéaforméunpourvoiencassationàl’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, celui-ci soutenait qu’il ne pouvait être déduit de l’absence d’autres grévistes au cours de la période visée par le préavis que le mouvement de grève était terminé, seuls les syndicats ayant initié le mouvement pouvant y mettre fin.
Il était donc demandé à la Haute juridiction de reconnaitre qu’il était possible pour un salarié d’une entreprise gérant un service public de se prévaloir d’un préavis de grève déposé par un syndicat représentatif pour faire grève seul.
Au visa des articles L.2511-1, L.2512-1 et L.2512-2 du Code du travail ainsi que de l’alinéa 7 du préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, la Cour de cassation a répondu par l’affirmative.
Plus précisément, la Cour rappelle dans un premier temps sa jurisprudence constante en matière de grève dans les services publics selon laquelle :
• le mouvement de grève doit être précédé d’un préavis régulier déposé par un syndicat représentatif (c’est-à-dire mentionnant l’heure début et de fin de l’arrêt de travail),
• les salariés sont seuls titulaires du droit de grève, de sorte que durant la période couverte par le préavis, l’employeur ne peut déduire de l’absence de salariés grévistes que le mouvement est terminé. Cette décision appartient uniquement aux syndicats représentatifs ayant déposé le préavis.
Dans un second temps, la Cour vient juger :
Au regard de ces constatations, la Chambre sociale, estimant que la cour d’appel a violé les textes susmentionnés relatifs aux droits de grève, casse et annule l’arrêt d’appel et renvoie les parties devant la même cour autrement composée.
Cette décision de la Cour de cassation est manifestement critiquable puisqu’elle vient écorner un principe essentiel du droit de grève selon lequel un tel mouvement doit nécessairement être collectif, sauf exceptions.
Surtout, une telle décision pourrait conduire à des abus du droit de grève, n’importe quel salarié pouvant désormais se retrancher derrière des préavis déposés par des organisations syndicales représentatives pour cesser le travail, quand bien même aucun de ses collègues ne se déclarerait gréviste.
Une application très stricte et relativement bornée qui n’a aucun sens à nos yeux.
Toutefois, il convient de préciser que fort heureusement, une telle solution doit se limiter aux entreprises gérant un service public, et ne peut être généralisée. Ainsi, dans les entreprises privées, la grève doit nécessairement être collective sauf à ce que le salarié souhaitant faire grève décide de s’associer à un mot d'ordre de grève nationale (Cass. soc. 29 mai 1979 n° 78-40.553, Cass. soc. 29 mars 1995 n° 93-41.863) ou qu’il soit le seul salarié de l’entreprise (Cass. soc. 13 novembre 1996 n° 93-42.247).
  « dès lors que la cessation de travail d’un salarié
pour appuyer des revendications professionnelles formulées dans le cadre d’un préavis de grève déposé par une organisations syndicale représentative dans une entreprise gérant un service public constitue une grève, peu important le fait qu’un seul salarié se soit déclaré gréviste ».
Droit social 10

















































































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