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Laurent Courtecuisse et Mathilde Charton
Paris
l’exonération partielle accordée, au motif que la société-animatrice avait cédé ses participations dans certaines de ses filiales avant l'expiration du délai légal de conservation des parts, et que l'activité de la société holding était donc devenue purement financière.
Après rejet de sa réclamation contentieuse, l’héritière a assigné l'administration fiscale en décharge des droits de succession et des intérêts de retard réclamés à son encontre, et au remboursement des sommes versées de ce fait.
3. LapositiondelaCourd’appel
La Cour d’appel a considéré que l'administration fiscale était fondée à soutenir que la perte par la société de sa fonction d'animatrice de groupe avant l'expiration du délai légal de conservation des parts rendait la transmission de ces parts inéligible à l'exonération partielle, faute de satisfaire aux conditions légales.
Cette dernière a en effet relevé que la société était certes, au jour du décès du légataire, une holding animatrice d'un groupe de sociétés dont elle assurait le pilotage et en a déduit que les héritiers pouvaient utilement revendiquer le bénéfice des dispositions de l'article 787 B du CGI.
Elle a cependant indiqué que « ce texte [ndlr. article 787 B du CGI précité] ne peut se concevoir, au regard de l'objectif fixé par le législateur, et, sauf à vider la loi de sa substance, que si ladite société conserve, pendant la durée exigée, sa fonction d'animation d'un groupe formé de filiales, lesquelles doivent, sauf circonstances indépendantes de leur volonté, comme c'est le cas, par exemple, dans l'hypothèse d'une procédure collective, conserver une activité économique ».
La Cour d’appel en a donc conclu que le périmètre du groupe peut être amené à évoluer et qu’un changement d’activité économique peut être envisagé, à la condition toutefois que la société holding conserve, à l'égard de ses nouvelles filiales, son rôle d'animation.
A défaut, l’administration est bienfondé à remettre en cause le bénéfice accordé.
4. L’opposition de la Cour de cassation au raisonnement opéré par l’administration fiscale
L’héritière faisait quant à elle valoir que la condition tenant à ce qu'une société holding anime son groupe
de sociétés, à laquelle est subordonné le bénéfice de l'exonération partielle de droits de mutation, ne doit être remplie qu'à la date de cette transmission et non postérieurement.
C’est finalement ce raisonnement qui a été suivi par la Cour de cassation.
Selon la Cour de cassation, la Cour d'appel en statuant en faveur de l’administration fiscale, a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas.
En effet, les dispositions de l'article 787 B du CGI ne prévoient pas que la fonction d'animation de groupe de la holding soit conservée tout au long des engagements mais seulement à la date du fait générateur de l’impôt, c’est-à-dire lors de la transmission des parts de cette société.
Réglant l’affaire au fond, la Cour rappelle qu’il est établi que :
• la société était, au jour du décès, une société holding animatrice d'un groupe de sociétés,
• parailleurs,l’héritièreaconservélestitresdecette société pendant la période de son engagement, soit quatre ans, et que les dirigeants sont demeurés à la tête de cette société pendant la durée requise, soit trois ans.
Par conséquent, les conditions pour bénéficier de l'exonération partielle de droits de succession, ont toutes étaient respectées.
La Cour de cassation a donc prononcé la décharge des rappels de droits de succession mis en recouvrement à l’encontre de l’héritier.
Par cet arrêt, la Cour de cassation s’oppose donc complètement à la position établie de l’administration selon laquelle « la condition du caractère de holding animatrice d'une holding de groupe s'apprécie au moment de la conclusion du pacte « Dutreil » ou de la transmission en cas d'engagement réputé acquis (...), et doit être remplie jusqu'au terme des engagements collectif, le cas échéant unilatéral, et individuel de conservation ». Cette position est inscrite au BOFIP sous la référence BOI-ENR-DMTG-10-20-40-10, point n° 55. Nul doute que cette position sera donc rapidement modifiée.
Droit des affaires 17