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Arnaud Blanc de la Naulte
et Rim Jebli Paris
Avant tout, il convient de revenir sur les faits de l’espèce :
Dans cette affaire, une société devait organiser des élections des membres des comités sociaux et économiques d’un de ses établissements.
Dans cette perspective, un protocole d’accord préélectoral avait été conclu le 9 octobre 2019 aux termes duquel il était prévu que les listes de candidats pour le premier tour devaient être déposées au plus tard le 4 novembre 2019 à 12h.
Le syndicat CFTC-CSFV avait adressé sa liste de candidats après expiration du délai fixé, soit à 12h16, de sorte que sa candidature déposée tardivement n’avait pas été retenue par l’employeur.
Dès lors, le syndicat contestait le rejet de sa liste prétextant que le syndicat FO l’avait déposé en main propre le même jour, laquelle avait été acceptée par l’employeur, sans qu’aucun élément n’atteste de l’heure de dépôt, et qu’en agissant ainsi, ce dernier avait manqué à son obligation de neutralité.
Ainsi, le rejet par l’employeur d’une liste de candidats déposée tardivement par un syndicat constitue-t-il un manquement à l’obligation de neutralité ?
Dans ces circonstances, le syndicat CFTC-CSFV saisissait le Tribunal d’instance de Bobigny aux fins de solliciter l’annulation des élections.
En effet, il faisait notamment valoir qu’il appartenait à l’employeur de prouver qu’il avait bien respecté son obligation de neutralité, et donc concrètement de prouver que le syndicat FO avait remis sa candidature avant 12 heures.
Le Tribunal avait décidé d’annuler les premier et second tour des élections du premier collège considérant que la liste de candidats du syndicat FO avait, certes, été déposée le 4 novembre 2019 mais que l’employeur ne justifiait pas de l’heure de son dépôt, de sorte qu’il n’était pas possible d’apprécier :
• d’une part, si l’heure limite de dépôt avait été respectée par le syndicat FO,
• etd’autrepart,sil’employeurquiavaitrejetélaliste de candidats du syndicat CFTC, n’avait pas favorisé le syndicat FO au détriment du syndicat CFTC.
Partant de ce postulat, par un jugement en date du 27 octobre 2020, le Tribunal judiciaire de Bobigny a considéré que la société ne justifiait pas avoir respecté son obligation de neutralité et a, en conséquence, annulé les élections des membres du CSE de l’établissement visé.
Dans ces conditions, l’employeur a formé un pourvoi en cassation en faisant valoir que le Tribunal avait privé sa décision de base légale au regard des principes généraux du droit électoral dès lors que : il incombait au syndicat invoquant une violation de l’obligation de neutralité d’en rapporter la preuve ;
• lesjugesdufondnepouvaientannuleruneélection professionnelle pour violation de l’obligation de neutralité de l’employeur sans caractériser de manière certaine cette violation.
Quid de la charge de la preuve en matière de respect de l’obligation de neutralité par l’employeur ?
Par un arrêt du 18 mai 2022, la Cour de cassation a cassé et annulé le jugement en toutes ses dispositions :
• d’une part, en rappelant que les irrégularités contraires aux principes généraux du droit
Droit social 5