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Arnaud Blanc de la Naulte
et Kevin Kancel Paris
1. Lesfaitsdel’espèce
Un directeur des systèmes d’information a fait l’objet d’un licenciement pour faute grave au motif principal de faits de harcèlement managérial.
En effet, ce dernier avait instauré au sein de l’entreprise un climat de tension et de peur. Aux termes de la lettre de licenciement son employeur lui reprochait notamment :
• d’avoir, par son comportement, placé une salariée au bord de la dépression ;
• d’avoir exercé une pression sur un collaborateur en se rendant à son domicile alors que ce dernier était en arrêt de travail, et ce afin de lui faire passer son évaluation annuelle ;
• d’être l’auteur de harcèlement à l’encontre d’une salariée, d’avoir été à l’origine de l’accident de travail de cette dernière et du contentieux prud’homal qu’elle a introduit par la suite à l’encontre de son employeur ;
• d’avoir adopté un comportement irrespectueux à l’égard de nombreux collaborateurs de l’entreprise, notamment envers les femmes avec lesquelles son attitude mêlait ambigüité sexuelle et tyrannie.
Or, il s’avérait que ce salarié échangeait régulièrement avec sa hiérarchie et notamment son DRH sur les méthodes employées à l’égard des collaborateurs de l’entreprise, de sorte que la société n’ignorait rien de la gravité de son comportement.
D’ailleurs, l’employeur avait même eu l’occasion de prendre parti en faveur de son directeur face à l’époux de la salariée harcelée.
2. La position de la Cour de cassation
A l’instar des premiers juges, la Cour de cassation a considéré que la faute grave est exclue dans cette affaire dès lors qu’il est patent que l’employeur avait non seulement connaissances des pratiques managériales de son collaborateur, mais les avait également approuvées.
Elle a ainsi validé la position de la Cour d’Appel qui, dans sa motivation, avait à bon droit :
• mis en avant le fait que les méthodes managériales de ce directeur envers une autre salariée n'étaient ni inconnues, ni réprouvées par sa hiérarchie avec laquelle il avait « régulièrement partagé ses constats relatifs à l'insuffisance de sa collègue et avait conduit en lien étroit avec elle un processus de changement et de réorganisation au sein de la direction dont il avait la charge ».
• relevé que le salarié avait agi en concertation avec son supérieur hiérarchique et le directeur des ressources humaines et que l'employeur avait d'ailleurs, comme évoqué ci-avant : « pris fait et cause pour lui en défendant les décisions prises en réponse aux doléances de l'époux de la salariée qui se plaignait de harcèlement ».
• déduit que : « le comportement du salarié, qui était le résultat d'une position managériale partagée et encouragée par l'ensemble de ses supérieurs hiérarchiques, ne rendait pas impossible son maintien dans l'entreprise »
• décidé « que ces faits ne constituaient pas une cause réelle et sérieuse de licenciement. »
C’est donc bien de manière claire et non équivoque que la Haute Cour a, à son tour, jugé ce licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse.
3. Laportéedecetarrêt
Nous le savons, au visa des dispositions légales, l’employeur est évidement tenu de prendre toutes les mesures nécessaires pour
Droit social 9